Un surprenant mélange de dénonciation de la connerie humaine, d'intrigue bollywodienne et de style enlevé, ce Cricket Club des talibans. Cela se passe à Kaboul à la fin des années 1990. L'héroïne du roman, Rukhsana, est une jeune journaliste de 26 ans. Libre, éduquée, indépendante, elle a fait des études de journalisme à Delhi et est revenue au pays où elle s'épanouit dans son métier tout en évitant de se marier à un homme qu'elle n'aime pas, mais à qui elle est promise depuis l'enfance, comme le veut la coutume.
Jusqu'au jour où les talibans débarquent, obligent Rukhsana à se dissimuler sous une burka, à se faire accompagner d'un chaperon pour ses sorties, puis à arrêter de travailler. Rukhsana s'enferme alors à la maison, s'occupe de sa mère malade et de son frère, en attendant un hypothétique départ pour les Etats-Unis, si son fiancé, désormais établi à l'étranger, lui envoie l'argent nécessaire au voyage. Il faudra payer un passeur, bien entendu. C'est ce que font beaucoup des ami.e.e et autres connaissances de Rukhsana, tout occupés à imaginer des moyens de quitter cette prison à ciel ouvert, où on n'hésite pas à tuer pour une cheville apparente ou un regard de travers. Toutes les distractions sont interdites. Les coups de fouet, les pendaisons en public n'épargnent personne ; la scène de l'exécution de l'ancien président Najibullah est horrible.
C'est alors que les talibans décident de redorer leur blason à l'international en faisant jouer à Kaboul un tournoi de cricket, un sport colonial autrefois interdit mais qui leur permettra de réintégrer le cercle des nations "civilisées". L'équipe gagnante ira s'entraîner à Karachi, apprend-on. Karachi, Pakistan, c'est-à-dire la perspective de la liberté et l'abandon de l'horrible grillage qui empêche les femmes de vivre, bien plus encore que le port de la barbe ne contraint les hommes. Rukhsana, qui a appris le cricket à l'université, car il y a des équipes de joueuses de cricket dans les universités indiennes, va avoir l'idée de monter une équipe familiale et d'organiser un exil groupé en gagnant le tournoi. Tous les cousins s'y mettent et seront solidaires jusqu'au bout. C'est parti pour une folle aventure, à jouer non seulement la balle de cricket, mais aussi l'intelligence et la malice face à la connerie des talibans. Et à risquer sa vie, car entre-temps, un de ces affreux est tombé amoureux de Rukhsana et veut l'enlever.
Un jour, heureusement, le Prince viendra. Pas le fiancé que Rukhsana n'aimait pas, non le Prince indien et hindou, beau comme un dieu, qu'elle aimait depuis le début. Ouf.