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dimanche 25 mars 2018

Ile déserte

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Et toi, tu choisirais quels livres à emporter sur une île déserte ? Trois livres maxi, c'est le jeu.

Autrefois, bardée de certitudes, j'aurais répondu : à coup sûr, un Albert Cohen, probablement Belle du Seigneur ; un Ishiguro, peut-être Un artiste du monde flottant  ; et, en troisième, une Bible, ancien et nouveau testaments, parce que c'est plein d'histoires et de rebondissements. Parfois, on y dégote une parole sage. 

Aujourd'hui, moins bardée de certitudes, et équipée d'internet, je ne sais plus. Trop habituée à me promener avec toute une bibliothèque virtuelle, toujours ouverte, toujours disponible. Il est presque impossible de me figurer une situation où je serais limitée à juste TROIS livres. Mais bon, c'est le jeu.

Côté pratique, j'emporterais sûrement une encyclopédie pour me souvenir du monde (mes neurones meurent, inexorablement, l'oubli s'installe, qu'est-ce que ce serait si je vivais seule sur une île et n'avais personne, ni internet, pour me rafraîchir la mémoire...). Côté romans, je crois que je choisirais toute la série des Rougon-Macquart, pour avoir de quoi lire et relire, longtemps... J'ai adoré ceux que j'ai déjà lus, adolescente, j'aimerais à mon rythme d'adulte lire (et relire) le tout. Ca me rappellerait la beauté de Paris, la ville, la misère que j'aurais quittées pour l'île.
A part ça, peut-être bien Ambiguïtés, d'Elliot Perlman, formidablement construit et qui rappelle quelque chose de très simple et fondamental : la perception de toute chose dépend du point de vue duquel on se place. Et je ne pourrais pas me passer d'un Murakami, La ballade de l'impossible, ou plutôt 1Q84 pour la compagnie des Little People

Au bout d'un moment, je saurais tous les livres par coeur, je réciterais des extraits, seule sur mon île...

Oops, pas de romancière parmi ces choix spontanés... pourtant, Annie Ernaux, Nancy Huston, Siri Hustvedt, Camille Laurens... Alors, en ajouter juste un, pourquoi pas Les années ?

C'est là que je me rends compte que je n'ai pas pensé à la poésie. Alcools, et Paroles, pourrais-je m'en passer ? Hum. Pas prête pour l'île déserte, la fille.

mardi 23 août 2016

Faire le vide


J'ai souvent observé que la question de garder ou pas ses livres divise. Des ami.e.s m'ont expliqué que c'était inconcevable, de se débarrasser d'objets tant aimés. Que parfois, on les relisait. Et puis non, des livres, ça ne se cède pas, c'est tellement bon de les conserver autour de soi. C'est joli. Ca représente un pan de la vie, une rencontre, une sensibilité, un partage, un souvenir. Etc. Etc.

Une autre fois, une bouddhiste m'a dit qu'à l'occasion d'un déménagement, elle avait éprouvé un grand besoin de s'alléger. Alors, elle avait donné la plupart de ses affaires, dont ses livres, puisqu'on ne les rouvre jamais.

Je suis en train de passer du paragraphe 1 au paragraphe 2. Ca déborde de partout et je suis comme un vieux disque dur prêt à se convertir au bouddhime : usée, saturée. Je ne peux plus emmagasiner davantage, encore bourrer dans les étagères, arranger pour que ça tienne, ne rien retrouver. Je ne peux plus entasser dans mon cerveau non plus. Je voudrais que lui et mon salon se transforment en un grand espace zen et blanc. Eternal Sunshine of the Spotless Mind.

La seconde d'après, ça me manquerait, j'imagine. Ce vide, ce grand blanc, de quoi serait-il fait ? Ne plus voir les noms d'auteurs, Huston, Hustvdet, Ishiguro ou Murakami dans la bibliothèque, ne même plus voir de bibliothèque. Les belles collections Actes Sud dont j'aime la couleur, le graphisme, l'odeur, le contenu. Ma mémoire s'évanouirait, je m'évanouirais. The Lady Vanishes.

Pourtant, je me dis souvent que les mails et le blog suffisent largement à garder une trace de mes lectures. Que je suis passée à autre chose, au numérique, c'est là que je lis, que je vis. C'est là que j'oublie, m'oublie. Et puis au fond, je m'en fous complètement, de ces lectures. Who cares.

Je suis clivée, perdue entre deux mondes, entre deux postures. Comme toujours, hein.

Un pas vers le nouveau monde, disperser une partie de mon stock et de celui de mes enfants. Ce n'est pas faute d'avoir aimé leur lire les albums de l'Ecole des Loisirs (ah, Grosse colère, quel bonheur...). Mais voilà, il est temps de mettre de l'ordre, faire des paquets pour respirer à nouveau. Hier, c'était Vénus qui recevait le sien. Aujourd'hui  ce sera Nounou. Demain, peut-être ma petite voisine de 5 ans, celle qui ne veut pas déménager sur un bâteau parce qu'alors on n'habiterait plus à côté... Le reste, direction Emmaüs.

lundi 28 octobre 2013

Un été sans les hommes

Un été sans les hommesComme d'habitude chez Siri Hustvedt, Un été sans les hommes combine ce qui m'apparaît comme des propos plein de sagesse avec des platitudes absolues. Siri fait du puzzle, pour ne pas dire du copié-collé. Elle rend compte avec finesse de ce qui la travaille sur le plan personnel, ses relations, son travail, sa fille, mais elle se fourvoie souvent quand elle cherche à rattacher cela à des travaux plus ou moins savants, scientifiques, philosophiques, essayistes : on n'y croit plus, cela semble plaqué. En même temps, c'est pour ça que je l'aime bien, Siri, pour cela que je l'appelle Siri et pas Hustvedt. Parce que je la comprends, je me sens tellement comme elle, à lire et copier-coller des citations, des situations, des témoignages, qui me donnent l'illusion de domestiquer ce qui autrement ne serait qu'un torrent débridé d'angoisses, de confusions, de débordements hystériques, de rêves et de joies aussi. Elle vit dans l'illusion et avec la volonté de comprendre, Siri, comme moi. C'est une sensible qui cherche la rationalité, ça la rassure peut-être.
Contrairement à Paul Auster son mari, Siri n'utilise pas d'histoire bien huilée, de coïncidence, d'invraisemblable qui emporte dans une littérature extérieure à soi-même et tellement confortable. Pas du tout. Elle se plante devant vous et vous fait un discours sur ce qui l'occupe et la préoccupe, ses tremblements, le mari infidèle ou le vieillissement de sa mère et le sien. Brut de décoffrage, pas de fiction, de faux-semblant, des prises de parole directes, à mi-chemin entre une conversation et un cours (elle enseigne ou a enseigné).
 
Elle réfléchit à des trucs qui me parlent.

Elle dit ce que je n'arrive pas à formuler ou que je n'ose pas dire.

C'est pour ça que je l'aime bien, même si parfois elle m'ennuie.

Et puis, elle est belle, Siri, une Scandinave immense, avec des jambes d'1m50, paraît-il.

Extraits :

"Le caractère éphémère du sentiment humain est proprement risible. Les fluctuations de mes humeurs dans le courant d'une seule soirée me donnèrent l'impression d'avoir un caractère en chewing-gum. J'étais tombée dans les profondeurs déplaisantes de l'attendrissement sur soi-même, un terrain situé à peine au-dessus des basses terres plus hideuses encore du désespoir. Et puis, sotte facile à distraire que je suis, je m'étais, peu à peu, retrouvée en plein délire maternel, prenant un plaisir fou à faire danser et à cajoler le petit d'homme emprunté à la voisine. J'avais bien mangé, bu trop de vin et embrassé une jeune femme que je connaissais à peine. Bref, je m'étais splendidement amusée, et j'avais bien l'intention de recommencer." p. 75-76

"Le temps nous embrouille, ne trouvez-vous pas ? Les physiciens savent jouer avec mais, en ce qui nous concerne, il faut nous accommoder d'un présent fugace qui devient un passé incertain et, si confus que puisse être ce passé dans nos têtes, nous avançons toujours inexorablement vers une fin. En esprit, cependant, tant que nous sommes vivants et que nos cerveaux peuvent encore établir des connexions, il nous est possible de sauter de l'enfance à l'âge adulte, puis en sens inverse, et de dérober, dans l'époque de notre choix, un petit morceau savoureux ici, un autre plus amer, là. Rien ne peut jamais redevenir comme avant mais uniquement comme une incarnation ultérieure. Ce qui était autrefois l'avenir est maintenant dans le passé, mais le passé revient à présent à l'état de souvenir, il est ici et maintenant dans le temps de l'écriture. Une fois encore, je m'écris moi-même ailleurs. Rien n'empêche qu'il en soit ainsi, n'est-ce pas ?" p. 208-209.

samedi 9 mars 2013

La voix de Siri

Siri Hustvedt, La femme qui tremble"C'est par la lecture que nous nous rapprochons le plus de cette pénétration de l'esprit d'un autre. La lecture est l'arène mentale où des styles de pensée différents, tels le dur et le tendre, et les idées qu'ils engendrent deviennent le plus apparents. Nous avons accès au narrateur interne d'un inconnu. Lire, après tout, est une façon de vivre à l'intérieur des mots d'autrui. Sa voix devient, le temps de la lecture, mon narrateur ou ma narratrice. Je conserve, bien entendu, ma faculté critique personnelle, et je m'interromps pour me dire : Oui, il a raison sur ce point ou : Non, il oublie complètement celui-là, ou encore : Ca, c'est un cliché, mais plus la voix sur la page est convaincante, plus je perds la mienne. Je suis séduite et m'abandonne aux mots de l'autre. En outre, je me sens souvent séduite par des points de vue différents. Plus la voix est étrangère, inhospitalière ou difficile, cependant, plus j'ai l'impression d'être partagée, d'occuper deux têtes à la fois."
 
 Siri Hustvedt, La femme qui tremble, Babel, p. 192.
 
Un livre très ennuyeux par moments et tellement juste à d'autres. La voix informée et honnête de Siri Hustvedt. Je préfère sa voix de romancière à ses propos d'essayiste, néanmoins.