samedi 29 juin 2013

Relire

correspondance
Relire chaque mot jusqu'à plus soif
Jusqu'à plus lecture
Les yeux fatigués
S'ancrer dans l'écrit
Se l'avaler soigneusement mot après mot
Comme si la vie en dépendait
Une vie amusante, différente,
Se rendre compte
Qu'il y a un malentendu
Ce n'était important qu'ici, là-bas on ne sait pas
Illusion d'échange, des changes

mercredi 26 juin 2013

Maintenant ou jamais

Christophe Fauré, Maintenant ou jamais
Maintenant ou jamais. Comme quadra, je suis soi-disant concernée par le sujet, d'ailleurs mes copines s'inquiètent de cette fameuse transition du milieu de la vie, la ménopause à venir, le mec qui les quitterait pour une jeunesse, les gosses bientôt partis vers d'autres horizons, le boulot où il faut défendre sa place. Le blues des classes moyennes plongées dans le néo-libéralisme, quoi. Les bons côtés : salaires confortables, vacances à l'étranger et image de la famille Ricoré, elles les oublient, le temps de la conversation. Elles préfèrent se la jouer  questions existentielles. Moi aussi. On se fait un peu peur, toutes ensemble, comme des gamines dans la cour d'école, les meneuses, les suiveuses et les autres. Je souris gentiment. Me demande pourquoi c'est la psychologie qui a triomphé, plutôt que la sociologie ? Pierre Bourdieu, au secours. 

Mon compagnon rigole, il dit : ma chérie, c'est parce que tu es trop jeune pour la crise du milieu de vie...  C'est vrai, que je m'en fous complètement... Ca n'existe pas, chez moi, ou plutôt c'est permanent. Ma vie est un déséquilibre chronique, un torrent de doutes, un voyage dans l'inconnu où alternent les mauvais passages d'angoisse et de nostalgie, et les période de gaieté, de soleil, de chaleur. Ca a toujours été comme ça. Des sommets de maintenant et des chutes de jamais bien douloureuses. Besoin d'intensité. Bipolarité ? Je rêve sans arrêt, m'invente des projets, des jardins secrets. Je me casse la gueule dans le jamais et repars dans le maintenant, à tout instant. Une transition perpétuelle, à moi toute seule.

Que ferais-je dans le moule de la crise du milieu de la vie, il est bien trop petit.

jeudi 13 juin 2013

Aomamé


Aomamé 1Q84
J'ai rencontré Aomamé. J'étais dans 1Q84 et elle me pétrissait le corps. Les méridiens invisibles. Les muscles froissés. Elle a aussi démonté le squelette, fait craquer les vertèbres, torturé le bas-ventre. Appuyé sur les jambes pour débloquer le dos. A propos de mon plexus solaire, j'ai demandé : pourquoi j'ai comme un caillou, là ? Elle a dit : on ne se connaît pas assez pour que je vous réponde. De toute façon, vous n'êtes pas prête à entendre. Je n'ai pas insisté. Je lui ai demandé si elle avait déjà lu Murakami ? Elle a dit non, j'ai beaucoup de mal avec la littérature japonaise contemporaine. Je n'ai pas insisté non plus. Je sens que je l'agace avec mes questions. Elle m'agace également avec ses semi-réponses et le bruit dans le cabinet, radio, téléphone, sonnette de la porte d'entrée, conversations avec les autres patients, manque d'intimité. Pourtant, Aomamé, à mes yeux, c'est elle.
 
Quand je suis sortie de chez elle, je n'avais plus mal nulle part, je sentais l'énergie circuler et j'avais envie de danser et de fleurs pour la maison. Il faisait beau. Elle avait pris soin de mon corps. Un ami avec qui j'avais longuement parlé avait pris soin de mon âme. Minerva aussi, à sa manière, qui devine toujours mes démons. Je me suis sentie  légère, délestée de mes soucis. Plus tard, en écoutant de la musique, le plexus solaire s'est ouvert et l'émotion m'a envahie, la tristesse soudain muée en gratitude.

samedi 8 juin 2013

Mourir

Venus
Elle m'a dit qu'elle avait eu envie de mourir. Ca m'a serré le cœur. Elle est belle, intelligente, amoureuse, elle est la vie même. Elle sourit. Mais elle a eu envie de mourir, ça l'inquiète, elle n'avait jamais eu d'idées aussi noires avant.
On n'a pas parlé de livres, on a quitté nos habits de lectrices, pour une fois. On a parlé de craquer. D'être en deuil à n'en plus finir. De ne pas s'écraser pourtant, tenir bon, ne pas passer à côté de ce qui est encore. De la fragilité qui reste là, dans la maturité. Des fantasmes névrotiques qui reviennent même si on les avait bien éteints (c'est quoi l'amour, déjà ?). De retourner en analyse, à nos âges, non mais franchement, n'importe quoi, on les a bien assez disséquées, nos blessures.
On se souriait un peu tristement tout en faisant mine d'aller quand même, on sait se tenir, on est des quadras épanouies. On rigole. On est devenues fatalistes. Nos yeux pétillent encore, je me suis dit, c'est ce qui compte.

mardi 4 juin 2013

The ghost

The ghost is back. Each time I have a look at my page, he is there. As always with the ghost, I have to force myself not to give meaning to his presence. He is there because he wants to be there, or hasn't realized he was there. It has nothing to do with me.

It has nothing to do with me. The rest is only in my brain.

Marc Chagall, Au dessus de la villeWhen the ghost was alive, a long time ago, any little thing in my daily life would become a sign of his presence. Thinking of him when opening my eyes in the morning. Thinking of him when brushing my teeth. When listening to a song on the radio. When smoking or drinking some red wine. He was like a piece of my brain, like a continuous TV channel switched on, like a big cloud invading any small part of my sky. I was constantly reminded of him.

When he disappeared from my life, it was a long grieving process to get out from him. The most difficult thing to kill is your own thoughts, to switch off the channel. To see the toothbrush or the clouds, when there's nothing else to see. To remember constantly that the ghost has gone and has nothing to do with me now. It took me years.

I don't like to get to the same webspace or page as him, because it gets me back to the grieving process and to him, to some extent. I have to make efforts, I have to resist. Exhausting.