Je n'ai pas toujours été comme ça. Je me souviens même d'une période de ma jeunesse où j'avais des certitudes, où un camarade quelque peu irrité m'avait indiqué qu'avant de me forger des opinions, je ferais bien de me documenter. J'avais rigolé, je crois, lancé une boutade, en sentant de sa part un reproche et un mépris social qui ne pouvaient être désamorcés que par un pas de côté (j'avais de la répartie, en ce temps là). Mais j'ai changé. J'ai diablement changé. Je n'ai plus de répartie. Et surtout plus aucune certitude, je trouve presque incongru d'exprimer des opinions. Pas envie de faire semblant de trancher, de basculer dans le politiquement correct, ni d'être non plus dans la minorité hostile. Rester tranquille, dans mon coin, comme si de rien n'était, étudier dans le silence. Ce n'est pas facile en ce moment puisqu'il faut choisir son camp, et que si tu n'es pas avec nous, tu es contre nous. Mais je ne peux pas, it's beyond my control comme disait cruellement John Malkovitch dans Dangerous liaisons (je le dis gentiment, ou plutôt ne le dis pas). Même si j'ai conscience que se comporter comme ça, c'est risquer de faire le lit du fascisme, de l'antisémitisme, de l'islamophobie etc.
Je ne sais rien, voilà la seule chose que je sache. Eux non plus, sans doute, mais ils sont tellement persuadés de savoir...